mars 8

L’abandonnée

Aux heures agonisantes d’un jour triste et gris,
M’éclipsant d’une fête tournant aux bacchanales,
J’avisais sur un pont la silhouette pâle
D’une bien jolie femme détrempée par la pluie.

Ses yeux couleur de perle semblaient deux océans
Dont le flot débordait sur ce monde silencieux.
Sa chevelure auburn voyait noyer ses feux
Par l’onde abondante de cette nuit de printemps.

La belle entre ses mains tenait une missive
D’où l’encre dégouttait, emportée par les eaux.
Sur la page inondée, on lisait quelques mots:
« Trouvez-moi à minuit chemin de l’autre rive. »

« Madame, puis-je ici, vous prêter assistance? »
Demandais-je tout de go, ému par sa vision.
L’inconnue répondit d’un souffle, à peine un son:
« Nous avions rendez-vous, monsieur, depuis l’enfance. »

Par les dieux, quelle surprise! J’en restais tout saisi.
Ses doux traits, en effet, me semblaient familiers.
Défaisant mon manteau, je vins l’en abriter
Car le bleu de ses lèvres me la disait transie.

« Belle dame, puis-je savoir, quel est donc votre nom? »
« Emily » me dit-elle, soudainement épuisée.
Et alors que j’allais mon bras lui proposer,
La beauté disparue sans autre sommation.

Sous l’averse ne restait qu’une infime fragrance,
L’ombre de son parfum, un billet en charpie,
Et moi, pauvre poète, en mon coeur meurtri.
La belle était fantôme de ma désespérance.


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Ecrit 8 mars 2017 par Damian dans la catégorie "Eclats d'âme

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