septembre 1

Maléfice

Quel est donc ce voile froid qui me couvre le corps
Ces perles qui scintillent au bout de mon regard
Images saccadées venues de ma mémoire
Rendant mon souffle court, emplis de mille remords

D’où provient cette humeur qui monte et m’envahit
Ce gout acre, métallique qui m’emplit le palais
Relents de fleurs fanées en couronnes, en bouquets
Qui m’étouffent à présent et me laissent transi

Quel est ce crépuscule qui tombe sur mon cœur
Comme si toute lumière dans l’instant s’éteignait
Ne laissant que grisaille, évanouies à jamais
Effacées par la main d’un sinistre vainqueur

Pourquoi donc la couleur a déserté mon âme
Me laissant tout soudain aveugle et orphelin
Dans une épaisse brume qui couvre mon chemin
Etreignant en ses voiles ma si fragile flamme

Où donc est mon esprit splendide et flamboyant
Lui qui fanfaronnait, placé en pleine lumière
Elle s’est évaporée son ardeur éphémère
En cette heure où s’avancent les spectres gémissants

Que reste-t-il alors qui anime mon être
Sinon la part sombre, prompte à abandonner
A laisser les ténèbres lentement me dévorer
Et quitter, silencieux, la terre qui m’a vu naître

Dans cette enveloppe vide, minée par les tourments
Une faible étincelle semble tenir encore
« A quoi t’accroches-tu, cet homme est déjà mort »
Semble s’interroger l’envahissant néant.

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août 21

Locataire indésirable

Depuis quelques temps maintenant
Une inconnue marche en mes pas
Elle s’est installée sous mon toit
Et dans mon ombre subrepticement

Elle s’est glissée dans ma demeure
Lorsque mon chemin a changé
Qu’une fragrance d’amour fané
Est venue envahir mon coeur

Mon corps s’est mué en mouroir
Lorsqu’Amour a succombé
Ma triste lame l’a étêté
J’ai vu la mort en son regard

Mon esprit n’est plus qu’indolence
Divertissements et diversions
Pour ne pas perdre la raison
Il se perd dans les jouissances

Je plonge mon âme dans l’irréel
Pour oublier un peu son poids
Le douloureux prix de mes choix
Et mon erreur originelle

Dans le silence de ma folie
Enfermé dans ma solitude
Ma mémoire en décrépitude
Diffuse en boucle mon infamie

Et ma mystérieuse invitée
S’amuse de me voir souffrir
Je la reconnais à son rire
Elle se nomme culpabilité.

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juillet 30

Petit homme

Petit homme pâle, égaré
Sur le pavé cette sombre nuit
Petit homme seul se demandant
S’il a sa place dans cette vie

Petit homme triste et fatigué
En perpétuel questionnement
Suit ses idées malavisées
Et se perd dans ses sentiments

Petit homme sombre et effacé
Cherchant la cause de ses tourments
S’emprisonnant dans ses pensées
Qui l’empoisonnent lentement

Petit homme mort à l’intérieur
Esclave de son aveuglement
Hypnotisé par des lueurs
Surprises dans des regards aimants

Petit homme pris dans sa coquille
Ne comprenant plus rien au monde
S’éloigne, son esprit s’éparpille
S’enferme dans sa tour de pierres ronde

Petit homme faible et oublié
Dans son donjon loin des humains
S’endort pour l’éternité
Heureux de disparaître enfin.

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juin 29

Rejoindre les ombres

Comme je suis venu, je disparaitrai
Comme je suis tombé, je me consumerai
Le temps brouillera la trace de mes pas
Ma plus fine empreinte s’évanouira

Des confins du monde au cœur de l’univers
L’antique maelstrom sucera toute entière
Chaque parcelle d’essence que mon âme à laissé
Et ma pauvre existence en sera effacée

Toujours de passage, jamais vraiment fixé
Sans savoir d’où je viens, ni où je dois aller
Sans un lieu que je puisse enfin nommer chez moi
J’erre de terre en terre, dans la nuit et le froid

Mon éternelle errance prendra-t-elle un jour fin?
Dois-je m’égarer sans cesse, oublier mon chemin
Pour pouvoir atteindre mon but, ma destinée ?
Faudra-t-il que je passe sans jamais exister ?

Fantôme au cœur cassé, éternel voyageur
En mon corps épuisé, mon faible esprit se meurt
Lentement, pas à pas, je rejoins les terres sombres
Jusqu’à la fin des temps, vivant parmi les ombres.

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juin 22

Achèvement

Lorsque sonnera l’heure, mon âme, nous partirons
Pour une paisible errance, au loin, vers l’horizon
Glissant au gré du vent dans le splendide azur
Nous emplirons nos yeux de paysages purs

Le long des vals secrets, des cours d’eau ombragés
Dans les vastes prairies, les plaines dissimulées
Nous laisserons nos corps au cœur de la terre
Fleurir, s’épanouir, devenir éphémères

Libérés de nos peines, des chaines matérielles
Nous partirons heureux pour une île nouvelle
Blottie au creux du monde, dans les voiles de l’éther
Seulement accessible aux vivantes chimères

Alors, nous élançant droit vers le firmament
Brûlant telles des étoiles dans un ciel éclatant
Nous étendrons nos bras vers notre nature mère
Rassemblant contre nous tous ceux qui nous sont chers

Calmement, patiemment, nous les endormirons
Tendrement leur essence en nous nous aspirerons
Pour traverser le voile de la réalité
Et assurer le règne de leur éternité

D’un bon nous filerons vers d’autres univers
Dans une gangue de cristal nous porterons nos frères
Pour faire naître la vie dans un monde éloigné
Après leur long sommeil, ils y reprendront pied

Et nous nous effacerons, notre tâche achevée
Regagnant l’outremonde, nous viendrons reposer
Dans le calme jardin au milieu des nuées
Où poussent les fleurs de lune et dorment les damnés.

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mai 27

Astronaute égaré

Cristal pâle sous gangue de chair
Dont la surface est fissurée
De noir et d’ambre il est veiné
Ce fragile vaisseau de matière

Il concentre en son intérieur
La complexe essence de mon être
Mélange étrange qui a fait naître
La vie dans mon mystérieux cœur

Concentré d’énergie stellaire
Et de grand vide du néant
Nourri d’éther, de sentiments
En son sein s’agitent les chimères

Oscillant entre clair et sombre
Agité par d’intenses typhons
Ce réceptacle d’émotions
Frissonne quand surgissent les ombres

Malgré son armure d’épiderme
Chaque sensation le fait vibrer
Parfois à presque le briser
Entrainant mon corps vers son terme

Les éclats qui dès lors se forment
Viennent entailler les couches de peau
S’extirpant comme lame de couteau
Et réveillent les démons qui dorment

Alors ma voix se fait venin
Galvanisée par la douleur
Projetant ces aiguilles de peur
Vers le malheureux importun

Les zébrures de l’âme de cristal
Laissent échapper la colère
En flammes brulantes et en éclairs
Echos de souffrance et de mal

Lorsque les feux sont apaisés
Vient la tristesse et les pleurs
Les longues crevasses du malheur
Sur le cristal se sont formées

Ce monde étrange, désaccordé
Résonne contre ma coque de verre
Y créant des brèches amères.
De quelle étoile suis-je tombé?

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mai 19

Pauvre faune et belle dâme

Au pays des troubadours, une nuit où j’allais danser
Je surpris une complainte par un faune déclamée
L’histoire d’une damoiselle qui l’amour ne trouvait
Car d’elle point n’était digne et pourtant la courtisaient

D’un chevalier mort loin la belle s’était éprise
Et malgré l’homme défunt, elle demeurait sa promise
Héritiers de ce dernier, oncle, frère ou beau cousin
Tous visaient la demoiselle toute entière à son chagrin

Hors le spectre du chevalier à un faune s’était confié
Lui donnant la lourde tâche de sa dame protéger
Esprit jeune et insouciant, faune avait donnée parole
Espérant briser ce pacte par une folle cabriole

De ce choix bien malhabile il fut malavisé
Car Dame Nature elle même prit la belle en pitié
« Toi Faune si prompt à rien, je te nomme son Gardien. »
« Tu serviras la donzelle jusqu’à ce qu’amour soit fait sien. »

Dès lors le libre esprit à la belle fut attaché
Son espoir de regagner un jour sa liberté
Tout bellâtre vint à passer qui bien vite fut rejeté
A toute force de ses sabots, le faune envoyait bouler

Digne fils de Dame Nature, il descellait en leurs cœurs
La tromperie, la fausseté, l’ombre noir du déshonneur
A aucun prix ne voulait que la belle soit flouée
Car deux serments le liaient au sort de la jeune beauté

Et chaque nuit il venait dans ce bosquet isolé
Conter cette tragédie et son malheur pleurer
Car nul sur cette terre n’était digne de briser
Le deuil de la demoiselle et son fantôme chasser.

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mai 5

Course vers la liberté

J’ai pris la route pour Onyria
Bien décidé à la trouver
Ne sachant vraiment où chercher
Mes songes ont dû guider mes pas

Sur le chemin j’ai rencontré
D’étranges êtres à la peau blême
Vagabonds marqués d’anathème
Aux yeux vitreux, l’âme égarée

J’ai croisé des rêveurs perdus
Subjugués par quelques ondines
Chimères aux membres longilignes
S’en repaissant comme sangsues

Plus loin voguait la nef des morts
Barque oblongue aux couleurs passées
Où terminent tous les égarés
Qui ont renoncé à leur corps

Au loin brillait, derrière un voile
Le phare brulant de la cité
Où toute idée lentement se crée
Et l’univers puisse sa moelle

Onyria, la ville de cristal
Où naissent les plus beaux enfants
Issus du repos des vivants
Puisant dans leur essence vitale

A la frontière des dimensions
J’ai frôlé l’onde à la toucher
Sous mes doigts s’est désagrégée
La sphère du rêve en extension

Sous mon regard s’est effondrée
Le dernier refuge de l’esprit
Me laissant seul, à ma folie
Livrés aux peines de mon passé.

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avril 24

Couard

J’ai usé mon regard sur des documents creux
Fatigué mon esprit sur des pensées vides
Perdu mon énergie, rendu ma peau livide
Lancé contre des murs s’élevant jusqu’aux cieux

Je me suis acharné contre leur robustesse
Frappant contre leur pierre ma chair jusqu’au sang
Epuisé mon esprit à me rendre dément
Sans jamais diminuer d’un brin leur rudesse

J’ai longtemps combattu mille moulins à vent
Ecrasant ma carcasse contre leurs grandes ailes
Cabossant mon armure, les chargeant de plus belle
Ils ont brisé mes armes d’un air indifférent

Tous ces échecs rongent mon opiniâtreté
Mon courage s’envole à mesure que vient l’âge
Avec lui mon essence s’étiole davantage
Et me fuit toute envie de vouloir avancer

Lentement, peu à peu, je cède à l’abandon
Mes espoirs se fanent, ne laissent que néant
Sans but, sans objectif, j’erre sur cet océan
Jusqu’à ce que m’engloutisse l’ivresse des grands fonds

Chaque instant mes ténèbres absorbent ma lumière
Alors ma vie s’enfonce dans cette obscurité
Ne voyant plus que l’ombre dans toutes mes idées
Je souhaite, non sans peur, que la mort me libère

Meurtri par mes erreurs, j’ai cessé le combat
Ainsi scellant mon sort, j’ai bien vite succombé
Mon âme s’est éteinte, mon esprit s’est noyé
Alors que la défaite s’emparait de moi.

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avril 20

Aux amours mortes

Dans l’onde immaculée dort la douce Ophélia
Perdue par sa folie d’avoir trop aimé
Un prince inconséquent au verbe acéré
Aussi dur que la lame qu’en elle il ficha

Ce monarque dément avait cru voir en elle
Un fantôme dangereux, ombre de son passé
Il fit tout ce qu’il put pour s’en débarrasser
Il paya ce forfait de regrets éternels

Nulle tombe pour la belle, rien qu’un cercueil mouvant
Une stèle sous marine glissant au fil de l’eau
Nuls hommages, nulles couronnes pour fleurir son tombeau
Cet amour tragique méritait bien un chant

Moi, le sombre rimeur, poète des cimetières
Errant parmi les dalles, silencieux mausolées
J’écris ces quelques vers aux amours oubliés
Aux romances tragiques, aux funestes chimères

Et je songe à tous ceux qui parcourent ce monde
A vitesse de comète, sans jamais percevoir
Que leurs vœux les plus chers, leurs ultimes espoirs
Se dressent devant eux, que le bonheur abonde

A qui sait le saisir lorsqu’il vient à passer
L’instant peut révéler toutes ses beautés cachées.

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