janvier 11

Oneïros

Sur les ailes du songe je laisse voguer ma plume
Pour éloigner mon être d’un monde de tourments.
L’encre du rêve s’écoule sur ce vélin si blanc
A mesure que mon âme s’égare dans les brumes.

Entre ses blanches volutes mes pas suivent un chemin
Conduisant au domaine d’antiques divinités.
Une sylve familière où j’aime m’aventurer,
Son épaisse frondaison cache merveilles en son sein.

Sur les rives d’un lac d’émeraude teinté
S’ébattent joyeusement quelques nymphes aux yeux clairs.
Elles dansent et virevoltent, projetant dans les airs
D’étincelantes gouttes en un voile de rosée.

La lumière complice nimbe leurs peaux nacrées
D’un reflet d’arc-en-ciel, gemmes évanescentes,
Poudre d’étoile ornant leurs tresses ruisselantes
Qu’une brise légère vient lentement disperser.

A quelques pas de là, dans un bosquet moussu,
Chantent les nobles fées de la cour d’Avalon.
Tisseuses de mélodies qu’égrainent les saisons
Au rythme de leurs voix le temps est suspendu.

Adossé à un charme plusieurs fois millénaire
Leur Prince posant sur elles son regard doré
Veille sur la quiétude du royaume enchanté
Rêvant probablement à de nouvelles chimères.

Derrière ses paupières s’ouvre l’empire de la Nuit
Où chaque créature voit son sombre reflet
Hanter l’obscurité quand le jour disparaît
Emportant les intrus dans les geôles de l’Oubli.

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décembre 22

Mirabilis

Sous la lune d’argent le lac scintillait
Changeant sa surface lisse en un curieux miroir
Où dansaient des images issues de ma mémoire
Glissant depuis mes yeux lorsque je me mirais

Dans l’onde je voyais les mille chemins possibles
Les croisements, culs de sac, les sentiers ignorés
Les actes, les conséquences, les causes oubliées
Toutes ces voies secrètes et leurs fruits invisibles

Ces routes mille fois tracées formaient d’étranges esquisses
Ici une rose radieuse, là une lame acérée
D’elles naissaient encore des tableaux familiers
Visages, scènes passées surgissant de l’abysse

Un éclair soudain vint rider les eaux claires
Quand hors des profondeurs surgit une main blanche
Puis le regard bleuté d’une nymphe vive et franche
S’extrayant d’un abyme aux couleurs mortifères

Ses doigts opalescents frôlèrent mon torse pâle
Et dans sa paume ouverte vint se lover mon coeur
Baignant dans sa lumière, blotti dans sa douceur
Il quitta ma poitrine sans me coûter un râle

Du rouge organe éclot un lys enténébré
Qui s’épanouissait, tige enserrant la chair
Le comprimant bientôt en ses étranges serres
Consumant son essence avant de se faner

Alors, d’un même élan, plante et organe noircirent
Devinrent de grises cendres, tombèrent en poussière
La surprenante naïade s’évanouit dans l’air
Le souffle me manqua et je crus bien périr

Dans le miroir du lac, mon image se troubla
Mue par une vie propre, elle quitta la surface
Elle m’arracha mon âme dans un soupir lasse
Privé de sa substance mon être s’effaça

Dans un flot d’étincelles le néant m’engloutit
Effaçant toute trace de ma maigre existence
Rêve désincarné, j’errais, plein de souffrances
Gommé par le Destin, aujourd’hui plus ne suis.

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décembre 9

Encrombre

Derrière les contreforts des montagnes obscures
Loin des prairies d’émeraude et des saules bleutés
Sous un dais fleuri d’ombres et de brumes empourprées
Je dors dans le silence de ma noire sépulture

C’est un tertre isolé en de sombres contrés
Bien au delà des mondes où les êtres s’agitent
Une terre désolée que les vivants évitent
Frontière d’un royaume à jamais oublié

Dans son ciel s’allument des étoiles écarlates
Comme autant de blessures à cette voûte infligées
Sur les champs de poussière répandant leur clarté
Entre buissons de ronces et cairns de pierres plates

Jadis s’y élevaient mille tours merveilleuses
Célébrant la grandeur d’un pays de légendes
Mais la folie, le doute, en une triste sarabande
Ont pris dans leurs filets ces terres vertueuses

Bientôt de fières seigneurs à la ruine ont couru
Portés dans leur élan par un fol souverain
Le sang d’êtres bénis lui maculant les mains
Il s’éleva en tyran avant d’être vaincu

La mort était trop douce pour un tel dément
Sur les vestiges du monde, son âme fut exilée
Depuis ce jour il veille et pour l’éternité
Le repos et la paix en vain espérant

Gardien de ce cimetière, d’un songe plus mort que vif
Les yeux sur l’horizon, le coeur dans le passé
Entre ces stèles j’erre, rêve désincarné
Jusqu’à ce qu’enfin vienne l’oubli définitif.

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septembre 21

Herenstrich (extrait)

« Je passai le reste de la journée dans ma chambre, plongé dans les feuillets de mon roman, m’astreignant à travailler pour éviter à mon esprit de battre la campagne. Lorsque la cloche du diner sonna, je descendis rapidement diner, échangeant quelques propos banals avec mes hôtes puis pris congé. Mais au lieu de remonter directement dans ma chambre, je me glissai dans la salle mitoyenne et me dissimulai entre les meubles couverts de draps blancs. J’attendis quelques minutes puis, lorsque je fus certain que les Von Barth ne quitteraient pas la salle de si tôt, je grimpais silencieusement les escaliers jusqu’ au palier de l’étage. Je m’orientais vers l’aile où j’avais aperçu la silhouette de la jeune femme à la fenêtre et progressais à tâtons dans le couloir sombre. Je comptais les portes pour trouver celle qui devait donner dans la pièce où se trouvait cette fenêtre.  Un mince rayon de lumière filtrant sous l’huis mis fin à mes recherches. Je collais mon oreille au panneau mais n’entendis aucun bruit. J’hésitais un instant puis me reculais d’un pas et frappais délicatement à la porte. Un froissement d’étoffes se fit entendre alors qu’une ombre passait devant le rais de lumière. Je perçus le souffle d’une respiration puis un léger mouvement d’air. La lumière disparut. Je m’approchais, frappant à nouveau légèrement sur le panneau, et murmurais :

« Veuillez m’excusez de me présenter si tard, mademoiselle. Je ne voulais pas vous effrayer. Puis-je vous dire quelques mots ? »

Pas de réponse. Je posais ma main sur la poignée, malgré l’inquiétude de ce qui pourrait arriver si jamais on me surprenait, et tentait de la faire jouer. A ma grande surprise, le penne joua et le panneau s’ouvrit. Je pénétrais dans une chambre joliment meublée mais visiblement inutilisée depuis longtemps. Quelques rayons de lune filtraient à travers les fenêtres dont les rideaux n’étaient pas tirés. Une couche de poussière grisâtre recouvrait le plancher ainsi qu’une petite coiffeuse au miroir ébréché et un vaste lit à baldaquin aux tentures passées. Pourtant, il flottait dans l’air une légère odeur de fumée, comme si une chandelle venait d’être soufflée.

Je restais un moment la main sur la poignée de porte, observant cette chambre inutilisée, incrédule. J’entrais finalement dans la pièce et l’examinais attentivement.  Mais les seules traces de pas sur le plancher, les seules marques d’une présence étaient les miennes.  Je ne comprenais rien. J’étais pourtant certain d’avoir trouvé la chambre de la fille des Von Barth ! J’avais même aperçu de la lumière sous la porte. »

 

Un petit extrait de quelque chose que je viens de reprendre. N’hésitez pas à commenter, critiquer, donner votre avis.

septembre 6

La fée de l’ombre

Devant ma plume rétive et ce vélin si blanc
lorsque le temps s’allonge et que les mots me fuient,
pour contrer la folie, j’abandonne, je m’enfuis
noyer sous mille bruits l’écho de mon néant.

Alors j’erre, je cours, loin de mes pensées sombres
suivi par les fantômes qui s’accrochent à mes pas.
Je me perds dans la foule pour éteindre leurs voix
quitter pour quelques heures ce carcan tissé d’ombres.

Mais nulle part je ne trouve le vrai apaisement.
Mes ténèbres, toujours, reviennent me hanter.
Partout elles s’accrochent, prêtes à me dévorer,
m’empoisonnant l’esprit de mille désagréments.

Seule une voix amicale parvient à les chasser:
le rire d’une fée de l’ombre veillant sur mon épaule.
Les feux de son regard cerclé d’un trait de khôl
effacent en un instant toutes mes noires idées.

C’est pourquoi quelle que soit l’issue de ces chemins,
quels que soient mes choix pour combattre l’Ennui,
par un lien mystérieux nos âmes restent unies,
le secret de mon être et mes songes demeurent siens.

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août 26

Apsara Lënalyn

Lorsque sur la grand place minuit sonna
j’errais avec ma peine et ma mélancolie
empli d’obscures pensés mon esprit s’égara
vers une étrange foule me guidèrent mes pas
attiré par l’éclat qui emplissait la nuit
devant son origine mon coeur s’arrêta.

Dans un cercle formé par le rassemblement
près d’un joueur de vielle égrainant une rengaine
se tenait une femme vêtue de simples hardes
et sur l’amère musique que produisait le barde
doucement elle dansait, silencieuse, sereine,
éblouissant le monde de gracieux mouvements.

De son ventre semblait naître l’oscillation
se propageant aux hanches en un beau roulement
qui remontait l’échine pour atteindre ses bras,
l’ondulation sublime repartant vers le bas
glissant jusqu’à ses jambes prises de frémissements
jusqu’à charger le sol de mille vibrations.

De ses gestes légers elle liait les regards
irradiant alentour une chaude lumière
se servant de son corps comme d’un envoûtement
happant dans son halo peu à peu chaque passant
elle rayonnait dans l’ombre, si simple et singulière
et moi je m’effondrais, terrassé, l’oeil hagard.

Au matin, je sortis de cette curieuse torpeur
l’esprit encore empli des brumes de cette rêverie
complètement épuisé, ne sachant où j’étais.
De ce songe intriguant plus rien ne restait
cette danseuses et son barde jamais je ne revis
mais d’elle subsiste en moi une profonde langueur.

…. fin alternative….

Au matin, je sortis de cette curieuse torpeur
l’esprit encore empli des brumes de cette rêverie
complètement épuisé, ne sachant où j’étais.
Etait-ce vraiment un rêve qui tant subsistait

ou ma mémoire refusant obstinément l’oubli ?

Lënalyn à jamais prisonnière de mon cœur…

 

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août 25

Aeterna umbras

Lorsque l’esprit n’est plus constamment occupé,
sans cesse il ressasse de bien sombres instants.
Alourdi par leur poids, le coeur toujours souffrant
sur un dallage de marbre vient alors s’écraser.

Ses éclats s’éparpillent en milliers d’étincelles,
esquilles de cristal teintées de gouttes carmin,
comètes à la traîne sombre s’éparpillant au loin,
où sang et minéral par un sort s’entremêlent.

De la blessure béante laissée par l’absent
s’écoule une noire bile sans discontinuer
dont l’âme vénéneuse vient s’insinuer
entre chaque parcelle de cet esprit mourant.

De ce flot se relève la cohorte des ombres
qui hante les méandres de cette mémoire usée.
Les erreurs, les regrets, les espoirs brisés,
tant de tristes fantômes surgissent de ces décombres.

Lorsque ne reste plus qu’une infime lueur
noyée sous les assauts de ces spectres décharnés,
sur son Horloge le Temps se met à reculer
rassemblant les fragments de ce malheureux coeur.

Alors la vie revient dans la blême carcasse
toujours un peu plus faible, marquée par ses souffrances.
L’être reprend le cour de sa pâle existence
jusqu’à ce qu’à nouveau les ténèbres l’enlacent.

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août 8

Et terne idée

Gouttes de nuit coulant sur un ciel chargé,
constellé de fragments renvoyant la lumière
d’un astre qui se fond dans l’ombre singulière
s’étendant lentement sur une terre oubliée.

Rouages de métal aux dentures usées
grignotés par le temps et par l’obsolescence.
Mécanique grippée en dégénérescence,
carcasse éventrée aux entrailles corrodées.

Territoire désertique à la surface brulée,
où tournent des bourrasques de sable mêlé de cendres
dont les mugissement toujours se font entendre.
Odeurs d’ozone, de foudre et d’arbres calcinés.

Jardins abandonnés où ne croissent que les ronces,
dissimulant les ruines d’une antique bâtisse.
Bosquets garnis d’épines où les ombres se glissent
agités par le vent qui hurle sans réponse.

Vastes plaines de glace où n’erre que la mort,
surface blanche brillante qui blesse le regard,
vide sans horizon où tout être s’égare,
où la raison se perd, happée par le décors.

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août 8

Eclipse

Lorsque, une nuit passée, j’ai quitté mon domaine
laissant la lune d’argent me tracer un chemin,
à l’angle d’un jardin, un chant m’a attiré.
Dans l’ombre s’élevaient les accords flutés
d’une voix douce et clair aux timbres aériens
fredonnant les paroles d’une mélodie ancienne.

Sous un kiosque de bois aux piliers ouvragés
niché entre les saules et les buissons de roses,
sous la simple clarté d’un ciel piquetés d’étoiles
chantonnait pour elle-même une beauté au teint pâle,
avec sa fraicheur de fleur tout juste éclose,
toute en délicatesse et en fragilité.

Pour ne pas la troubler je restais en retrait,
bercé par la tendresse en chacun de ses mots,
quand un rayon de lune à elle m’a révélé.
Dans un battement de cils nos yeux se sont trouvés,
nos coeurs ont échangé leurs craintes, leurs défauts,
tissant un lien unique qui toujours nous lierait.

Mais les feux magnifiques de cet amour naissant
étaient déjà marqués par des destins contraires.
De par nos origines nous ne pouvions nous unir
sans choisir l’exil, tout perdre et nous enfuir.
Un coeur de ténèbres et une fille de lumière
amèneraient le chaos s’ils devenaient amants.

Notre passion pourtant poussait à mille folies.
Trop longtemps l’un sans l’autre nous ne pouvions rester.
Chaque nuit nous jouions d’imprudence pour nous plaire
et bien vite le secret par d’autres fut découverts.
Alors devant les dieux, nos destins furent scellés,
nous fûmes séparés, notre bonheur périt.

Pour lui épargner d’indicibles souffrances,
j’acceptais de prétendre l’avoir corrompue,
d’être seul responsable de tant de légèreté,
banni hors de ce monde pour qu’elle puisse oublier,
de mes ailes de mon rang, de tout titre déchu,
sans espoir qu’un jour vienne ma délivrance.

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août 7

Cléa

C’est une âme silencieuse, une ombre passagère
héritée des errances d’un esprit divaguant
le long d’un ruban sombre où s’écoule le temps
oeuvrant pour me conduire sur des voies singulières
en total désaccord avec certains voeux.
Lumineuse chimère visitant ma pensée,
y-as-tu déposé ton reflet amusé
sûre de pouvoir un jour apparaître en ces lieux ?
Etrange petite fée à la douceur mutine,
libre de toute entrave car jamais incarnée,
instrument mystérieux d’une autre destinée,
sauras-tu en ce monde faire ta marque enfantine?
Astucieuse, riante, courageuse, effrontée,
bientôt comme ton père tu vogueras au loin.
Empruntant son manteau pour suivre son chemin,
tu embrasseras des yeux, d’un air émerveillé
héroïnes et sages de mille songes venus.
Aussi loin que te portent tes pas hors de ma vue
vas sans crainte et emporte avec toi mon coeur.
Entre tes fines mains il brillera de bonheur,
laissant s’épanouir ta divine jeunesse,
inspiré par ta joie et tes mots de tendresse.
Nul mal ne viendra ternir ton existence
et tes jours éclaireront ma lente renaissance.

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