Sanguemortis
Dans les cigües amères, sous les ronces acérées
Entre les vieilles racines et les pierres couchées
D’un ancien sanctuaire aux rîtes oubliés
Serpente une rivière d’ombre et de sang mêlée
Les pâles rayons de lune glissent entre les branches
De hêtres centenaires à l’écorce très blanche
Quelques gouttes scintillantes d’une étrange rosée
Coulent du bord d’une feuille vers le ru empourpré
Entre deux racines bât la clameur de la terre
Humus palpitant où s’agitent les vers
Qui fouissent sous le sol de ce lieu défraichi
Où croupissent souvenirs et mémoires honnis
Méandres après méandres, le fleuve marécageux
S’éloigne de ce tertre à l’aspect vénéneux
Etendant ses bras sombres vers une plaine brulée
Où dansent des fantômes dans des bosquets fanés
Aux abords d’une stèle, un être demeure assis
Puisant d’une vieille coupe l’eau saumâtre et rubis
Et buvant à pleine gorge cet élixir maudit
Apportant à son âme la paix de l’agonie
Tableau de désespoir où rode la démence
Paysage fait de mort et de malévolence
Voici Sanguemortis, terre d’obscure beauté
Où parfois mon esprit aime à s’égarer.