Rêverie
Sous un chêne centenaire, je me suis assoupi
Profitant de son ombre, écoutant son murmure
Je me suis élancé, voletant dans sa ramure
Jouant avec les merles, les moineaux et les pies
J’ai vu passer des ciels aux millions de couleurs
Des astres s’allumer, embrasant l’univers
Des comètes zébrer l’azur de leur poussière
Comme le temps coulait tel un torrent rieur
J’ai vu mon corps tomber, redevenir cendres
Et mon âme s’élever pour arpenter l’espace
De toute l’humanité il n’y eut bientôt plus traces
Si ce n’est quelques ruines noyées sous la terre tendre
Devant mon regard neuf, l’infini s’est ouvert
Révélant ses secrets, sa magie, ses chimères
Chaque onde, chaque atome se sont mis à chanter
A mesure que mon être s’est fait plus éthéré
Tous ces sons en substance racontaient leur histoire
Les spasmes de la naissance, les douleurs, les espoirs
Leur peur de la mort, puis leur évolution
Le lent cheminement vers la résignation
« Voila l’aboutissement, les accords de la Fin »
« Vers la conscience ultime nous suivons le chemin »
Leur chant devient un mot, une syllabe, un phonème
Alors qu’ils fusionnaient, étrange phénomène
Et soudain devant moi parut l’éternité
Primordiale étincelle devenue entité
D’un regard je sus tout, passé, présent, avenir
Tous les plus grands mystères, erreurs, souvenirs
Je devins un instant chaque être de ce grand inconnu
Je savais, sentais tout de chaque individu
Noyé dans l’absolu, la suprême quintessence
Mon âme se dissolvait pour une nouvelle naissance
Alors je revins, graine emporté par le vent
Jeune pousse, si frêle, soumise aux éléments
Puis bientôt tronc solide, porté par mes années
Apprécié des dormeurs pour ma sérénité
J’étais devenu l’arbre gardien de mon sommeil
M’apportant la fraicheur sous ce puissant soleil
Une trille de pinson qui soudain retenti
Me tira du sommeil, me laissant ébahi.