décembre 11

Froidombre

En une forêt obscure faîte de troncs figés
De branches distordues à l’aspect maléfique
De racines serpentant sur un sol désertique
Balayé par le gel et les brumes glacées

Entre les piliers sombres rongés par les ténèbres
De ces arbres enchainés dans un monde hors du temps
Sous la pâle lumière d’un astre agonisant
Un bloc d’obsidienne marque une présence funèbre

Sur la surface noire quelques lignes passées
Encadrent un visage patiné par les ans
Bien que pris dans la pierre il en semble vivant
On croirait presque voir sur ses lèvres une buée

Rodant prêt de la stèle, glisse une sinistre engeance
Toute couverte d’ombre et l’aspect décharné
Les mains telles des serres, esprit désincarné
Emplissant de terreur pas sa seule présence

« Toi qui erre par ici, sais-tu quel est ce lieu »?
C’est la voix rocailleuse de cet engoulevent
Qui résonne partout, emportée par les vents
Et saisi votre cœur lorsqu’il croise vos yeux

Sa glaciale emprise s’empare de tous vos membres
Et soudain votre corps vous apparait vidé
Votre énergie s’est vue d’un seul coup aspirée
Vous voici condamné, il n’a plus qu’à vous prendre

Et vers cette sombre stèle, il va vous emporter
Posant votre dépouille sur ce froid minéral
Et vous enfermera dans le vide abyssal
De votre tombe amère que vous vîntes trouver.

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décembre 10

Condamné

Sous les vieilles craquelures de ma carcasse usée
S’éteignent d’antiques astres perdant leur énergie
Ils éclairaient les mondes de rêves évanouis
Que ma pauvre cervelle a trop vite oublié

Un à un, lentement, tombent ces vieux flambeaux
Soufflés par le néant qui ronge mon intérieur
Il étend son emprise depuis mon propre cœur
Au rythme de ses râles et de ses soubresauts

Le chagrin sur mon corps déploie son froid manteau
Consumant les rares flammes qui encore m’animaient
Une triste nuit d’hiver où toute âme gèlerait
Emplit chaque parcelle de mon être à nouveau

Renonçant à la lutte, j’accueil l’obscurité
Les ténèbres s’emparent de toute trace d’énergie
Je ne peux triompher devant cet ennemie
Cédant au désespoir, ma raison a flanché

Que cette ultime douleur me conduise au tombeau
J’ai perdu tous mes rêves, corrompu tous mes songes
Qu’en cette immense absence mon éternité plonge
Mon temps doit s’achever, brisé par tant de maux

Qu’il ne reste pas trace de ma triste existence
Nul autre ne doit jamais emprunter ce chemin
L’on y trouve que malheur, tourments sans aucune fin
Que mon sinistre sort scelle toute cette souffrance.

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novembre 19

Madone

Elle a la douceur d’une madone de Raphael
La beauté diaphane de la Vénus de Botticelli
L’aura de mystère de la Dame à l’Hermine de De Vinci
Un charme délicat, évident, naturel

Elle croise mon chemin, envahit mes pensés
Plus nous nous côtoyons, plus je suis apaisé
A travers le voile, je la vois rayonner
Son âme est aussi belle, une grâce révélée

Je resterais des heures à la boire du regard
Admirer tout son être briller, s’épanouir
Quitte à me consumer, à me laisser mourir
Brulé par cette lumière qui gomme mes cauchemars

J’ai si rarement croisé dans mon éternité
D’êtres resplendissant, à la majesté pure
Que j’en trouve mon destin tellement injuste et dur
Je donnerais mon âme pour mieux la protéger

Je souhaiterais pouvoir ôter ma corruption
Je craindrais de lui nuire par un simple touché
Aussi vais-je demeurer dans mon obscurité
Ecartant de sa voie malheurs et déceptions

Cet être de pure lumière, de si tendre émotion
Jamais ne dois souffrir des affres de ce monde
Moi, l’être de ténèbres en qui douleurs abondent
Je place en cette merveille mon vœu de rédemption.

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novembre 18

Les danseurs

Dans sa course infinie, le temps s’est suspendu
Pendant quelques instants, portés par la musique
En quelques pas de danse dans cette bulle magique
La douleur, la tristesse, pour moi n’existent plus

Il n’y a que l’instant, la douce ondulation
L’étincelle des regards, l’onde qui nous parcourt
Qui vibre et nous emporte, nous laisse le souffle court
Un éclair fugace où brulent mille émotions

Le rythme est ralenti, l’esprit exacerbé
La raison laisse place à l’expression des sens
Les cœurs se font plus proches en cette salle immense
Qu’à tout autre moment, par la vague soulevé

Tant de messages passent par le seul toucher
Un monde de partage s’ouvre entre les danseurs
Un canal secret, dialogues cœur à cœur
Sans aucune parole, l’ouïe étant saturée

Je suis toi, tu es moi, la frontière est brouillée
Nos souvenirs se mêlent comme nos sensations
Une étrange harmonie nous emplit de frissons
L’espace d’une seconde nos âmes ont fusionnés

Sur un dernier accord, les couples se saluent
La magie se retire, l’espace reprend ses droits
Reste un pâle souvenir qu’un souffle chassera
Jusqu’à une prochaine danse, un nouvel absolu.

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octobre 17

Morir

Enchanteresse au regard sombre
Surgie du fond de mes pensées
Par mes pleurs, mes cris, invoquée
Lorsque sur moi tombent les ombres

De tes ongles tu griffes le voile
Qui te sépare de ce monde
De tes yeux mon âme tu sondes
Et d’un sourire tu te dévoiles

Bientôt j’aurai le rituel
Te permettant de traverser
Cet interdit sera brisé
Tu auras une enveloppe charnelle

Mais ne te laisse pas dominer
Abuser par l’éclat des joyaux
Cet univers n’est pas si beau
Qu’il mérite de tout sacrifier

Je t’ouvrirai la porte antique
T’accueillerai plein d’espérance
Te nourrirai de mon essence
Me noierai dans ton être inique

Je te donnerai mon étincelle
Pour chasser ma mélancolie
Pour m’effacer, pris dans l’oubli
Que la Mort me prenne sous son aile

J’ai vu trop de vies, de souffrances
J’ai trop vécu, bien trop pleuré
Que mon coeur me soit arraché
Je veux que cesse mon existence.

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octobre 15

Désolation

Dans les salles désertes et poussiéreuses
Dans les miroirs pâles et glacés
Dans les fauteuils vides et fatigués
Dans cette ombre figée à la couleur cendreuse

Sur ces horloges lentes, presque immobiles
Sous ce ciel grisâtre et détrempé
Sur cette plaine triste et désolée
Dans ce vide insondable et stérile

Sur ces bougeoirs éteints, à la cire coulée
Devant cet âtre froid où le feu s’est éteint
Dans les accords grinçants de ce lieu en déclin
Sur ces vitres alourdies par l’atmosphère gelée

Dans ce cristal voilé qui cesse de réfléchir
Au fond de ce grenier aux souvenirs passés
Dans cette carcasse vide aux chairs déchiquetées
Sur cette lande humide où tout vient à pourrir

Dans cet antre perdu, oublié par les ans
Où moisissent les vestiges de ce qui pourrait être
Au cœur de cet enfer où désespoir vient naître
Où résonne en silence le hurlement du temps

Sur cet odieux portait au modèle prisonnier
Où toute vie s’efface en une teinte cireuse
Où son regard mort contemple une mer brumeuse
Qui reste sans mouvement pour l’éternité

Dans ce manoir sinistre où flotte la souffrance
Entre les lattes disjointes d’un parquet éventré
De cette terre monte une plainte murmurée
Qui tient en un seul mot, et ce mot est: absence.

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octobre 1

Onyria

J’aimerais plus souvent aborder tes rivages
Laisser glisser ma barque sur la mer de nuages
Mirer les étincelles allumant ce ciel noir
Qui enveloppe ce monde, l’embrasser d’un regard

Me perdre sur les plages aux teintes ivoirines
Jouer avec les nymphes des mares opalines
Danser parmi les champs d’herbes brunes et dorées
Enlacer cette terre et lentement m’élever

J’errerais doucement en ce pays des rêves
M’extasiant, découvrant ses merveilles, sans trêve
Et lorsque l’épuisement, enfin, m’aura gagné
Entre deux monts splendides j’irai me réfugier

Je me loverai au creux d’un buisson de bruyère
M’enivrant du parfum de cette étrange terre
Alors je laisserai le sommeil m’emporter
Pour parcourir en songes cette splendide vallée

Au matin la lumière céleste m’éveillera
Et je trouverai l’arbre qui ne pousse qu’ici bas
J’y déposerai mon cœur, le laisserai reposer
Pour prévenir mon âme des douleurs du passé

J’abreuverai mon esprit de la sève de ces lieux
Pour apaiser enfin les tourments et les feux
Qui embrasent mon corps, le dilatent et l’agitent
Menaçant d’explosion mon être qui palpite

Alors l’harmonie de ce monde m’éclairera
Et toute mon essence avec elle fusionnera
Je deviendrai une part de ce lieu merveilleux
Pour le voir grandir et briller de mille feux.

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septembre 1

Maléfice

Quel est donc ce voile froid qui me couvre le corps
Ces perles qui scintillent au bout de mon regard
Images saccadées venues de ma mémoire
Rendant mon souffle court, emplis de mille remords

D’où provient cette humeur qui monte et m’envahit
Ce gout acre, métallique qui m’emplit le palais
Relents de fleurs fanées en couronnes, en bouquets
Qui m’étouffent à présent et me laissent transi

Quel est ce crépuscule qui tombe sur mon cœur
Comme si toute lumière dans l’instant s’éteignait
Ne laissant que grisaille, évanouies à jamais
Effacées par la main d’un sinistre vainqueur

Pourquoi donc la couleur a déserté mon âme
Me laissant tout soudain aveugle et orphelin
Dans une épaisse brume qui couvre mon chemin
Etreignant en ses voiles ma si fragile flamme

Où donc est mon esprit splendide et flamboyant
Lui qui fanfaronnait, placé en pleine lumière
Elle s’est évaporée son ardeur éphémère
En cette heure où s’avancent les spectres gémissants

Que reste-t-il alors qui anime mon être
Sinon la part sombre, prompte à abandonner
A laisser les ténèbres lentement me dévorer
Et quitter, silencieux, la terre qui m’a vu naître

Dans cette enveloppe vide, minée par les tourments
Une faible étincelle semble tenir encore
« A quoi t’accroches-tu, cet homme est déjà mort »
Semble s’interroger l’envahissant néant.

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août 21

Locataire indésirable

Depuis quelques temps maintenant
Une inconnue marche en mes pas
Elle s’est installée sous mon toit
Et dans mn ombre subrepticement

Elle s’est glissée dans ma demeure
Lorsque mon chemin a changé
Qu’une fragrance d’amour fané
Est venue envahir mon coeur

Mon corps s’est mué en mouroir
Lorsqu’Amour a succombé
Ma triste lame l’a étêté
J’ai vu la mort en son regard

Mon esprit n’est plus qu’indolence
Divertissements et diversions
Pour ne pas perdre la raison
Il se perd dans les jouissances

Je plonge mon âme dans l’irréel
Pour oublier un peu son poids
Le douloureux prix de mes choix
Et mon erreur originelle

Dans le silence de ma folie
Enfermé dans ma solitude
Ma mémoire en décrépitude
Diffuse en boucle mon infamie

Et ma mystérieuse invitée
S’amuse de me voir souffrir
Je la reconnais à son rire
Elle se nomme culpabilité.

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juin 29

Rejoindre les ombres

Comme je suis venu, je disparaitrai
Comme je suis tombé, je me consumerai
Le temps brouillera la trace de mes pas
Ma plus fine empreinte s’évanouira

Des confins du monde au cœur de l’univers
L’antique maelstrom sucera toute entière
Chaque parcelle d’essence que mon âme à laissé
Et ma pauvre existence en sera effacée

Toujours de passage, jamais vraiment fixé
Sans savoir d’où je viens, ni où je dois aller
Sans un lieu que je puisse enfin nommer chez moi
J’erre de terre en terre, dans la nuit et le froid

Mon éternelle errance prendra-t-elle un jour fin?
Dois-je m’égarer sans cesse, oublier mon chemin
Pour pouvoir atteindre mon but, ma destinée ?
Faudra-t-il que je passe sans jamais exister ?

Fantôme au cœur cassé, éternel voyageur
En mon corps épuisé, mon faible esprit se meurt
Lentement, pas à pas, je rejoins les terres sombres
Jusqu’à la fin des temps, vivant parmi les ombres.

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