La mort de l’innocence
Sous un rayon de Lune brille le champ de neige
Blancheur immaculée où dansent des gouttes d’argent
A la lisière du bois, une biche au doux flanc
S’avance lentement, guettant le moindre piège
Elle a longtemps couru, à travers les fourrés
Frémissante, en alerte, attentive à chaque bruit
Sentant les prédateurs se glisser dans la nuit
Evitant leur présence pour moins les attirer
Un sabot après l’autre elle ose s’aventurer
Sur cet espace vierge qu’aucun souffle ne trouble
Prudemment elle progresse, de vigilance redouble
A travers ce désert de sensations glacées
Soudain, dans le lointain, résonne un claquement
Surprise, la tendre bête se fige, clignant de l’œil
Les naseaux frémissant, cherchant parmi les feuilles
L’indice qui révélera l’invisible assaillant
Dans un battement de cils l’animal s’effondre
Sans comprendre, elle râle, rend son dernier soupir
L’encolure percée, trace noir sur son cuir
Laissée par une balle qu’un homme vient de fondre
Alors que l’aube se lève, la biche a trépassé
Fendu de part en part, son cœur agonisant
Répand sur la neige fraiche la chaleur de son sang
Et l’assassin s’avance pour prendre son trophée
De sa besace il sort une coupe d’acier
L’appliquant sur la plaie, il prélève son dû
Puis la porte à ses lèvres et savourer, repu
La vie de l’innocence qu’il vient de sacrifier.