juillet 28

Cabotin

Connaissez-vous l’histoire de Maître Arti le Fat?
Qu’un rien fait chavirer, se pâmer sans façon
Pour une reine de bal ou une simple Suzon?
Laissez-moi vous conter cette aventure là!

Notre bellâtre vint, un jour de promenade,
A croiser belles dames comme s’il en fleurissait:
Une mystérieuse Ondine, dont le cœur souriait
Lui fit, au premier pas, le sang battre chamade.

Et dans l’allée suivante, une douce ingénue
A la Marbre blancheur cachée sous une ombrelle
Lui tourna tant les sens, attendrissante oiselle
Que notre mirliton en fut tout éperdu!

La tête tourneboulée, voici qu’il croise encor
Une petite nurse anglaise, fière et bien vertueuse.
La Candide au teint clair, l’âme noble et généreuse
Reçu plus d’une œillade de l’audacieux centaure.

A peine passe un nuage que ce simplet belître
Salue de tout son être une brune hispanique.
Señora Francesca, cousine volcanique,
Lui inspirant tendresse depuis moult chapitres.

Et ainsi passent les heures au rythme des rencontres
Sans qu’aucune prétendante n’attire sa préférence.
Maître Arti ne dit mot et feint l’indifférence,
Il craint le ridicule si jamais il se montre.

Car nulle de ces beautés ne vient parler d’amour
Et lui ne sait comment savoir s’il est aimé.
Alors, la nuit venant, il s’endort, esseulé,
Espérant un indice lorsque poindra le jour.

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juillet 24

Marées

Dans coffret en bois aux solides ferrures,
Pris en une gangue de glace que rien ne peut briser,
J’ai remisé mon cœur pour ne plus le blesser
Et fais mouler sur lui une solide armure.

Pourtant, c’est lui qui tonne, se contracte et palpite
Lorsque vient à passer la douce et belle oiselle…
Un mot d’elle, un sourire et mon esprit chancelle,
Mes protections s’effondrent à cette vue subite.

L’émotion, indomptable, fait tomber les barrages;
Mon être rit aux anges et brûle comme un enfer;
Des châteaux en Espagne peuplés de mille chimères
Emplissent mes pensées; ma raison fait naufrage.

Alors que passe l’heure, la colombe s’envole;
Avec elle disparaît une part de mon essence;
En mon fort intérieur viennent ombre et souffrance
Soufflant loin de mon âme mon espérance folle.

La joie pâlit, s’éteint, car tombe le rideau;
L’oiselle n’est point mienne, pas même pour un instant;
C’est par pure bonté d’âme qu’elle apaise mon tourment;
Après tout, je ne suis qu’un vieil et sombre idiot.

J’ai couru trop longtemps après les dames célestes
Que mon front s’est terni sous leurs vives lumières.
Que de temps à passé! Pour moi, c’était hier!
Mais voilà que résonne la cloche au chant funeste.

Douce ondine, fée d’argent, divines apparitions,
Pardonnez mes regards et mon discours usé.
Que vous apporterait mon être fatigué ?
Vous, jeunesses éternelles, veillez à vos passions.

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