juin 20

Vesta

En cette nuit caniculaire
Où la chaleur m’écrasait
Mon esprit même se liquéfiait
Prisonnier de l’éclat solaire

Aucun souffle pour soulever
Le pesant voile de mes paupières
Des fumerolles sorties d’enfer
Dans l’air lourd venaient danser

Pourtant lors d’un battement de cils
Chassant une goutte de sueur
Je distinguais dans ma torpeur
Une silhouette fine et gracile

Une beauté aux teintes fauves
A la crinière cramoisie
Venait me tirer de mon lit
M’envoutant de ses grands yeux mauves

En un instant elle fut sur moi
Créature au toucher de braise
Sous sa main j’étais comme glaise
Modelé au gré de nos ébats

L’obscurité déjà brulante
S’enflammait sous les feux uniques
De ses étreintes volcaniques
Et de ses caresses ardentes

Par ses ardeurs embrasées
Elle fit de moi sa marionnette
Jusqu’à se voir satisfaite
Me laissant presque consumé.

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juin 15

Thétis

J’ai rêvé de ta voix, j’ai rêvé de tes bras
De ton si beau sourire, de tes éclats de rire
Nous étions libres et fous, esprits en devenir
Avec toi chaque instant devenait une joie

Espiègles et joueurs, glissant dans les nuées
Nous survolions le monde, lucioles ensorcelées
Et à chaque seconde, j’aimais te regarder
Toi qui étais mon astre, ma déesse incarnée

Puis j’ai ouvert les yeux pour mieux te contempler
Un rayon de soleil venait te caresser
Mais lorsque j’ai voulu d’un geste t’enlacer
Sous mon regard aimant tu t’es évaporée

Car tu n’existes pas, car je n’existe pas
Il n’est que cette carcasse où le vide s’accroit
Que l’absence et le rêve que je comble de toi
Car tu n’existes pas, car je n’existe pas.

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juin 10

Suspiria de profundis

Par une sinistre nuit, j’errai, le coeur glacé
Environné de brumes, dans un gouffre profond
Comme pris dans le voile où le monde se fond
Sur une sente sinueuse je m’étais égaré

D’un coté et de l’autre, où que le regard porte
Rien ne se distinguait qu’une lande désolée
Une terre grisâtre, un ciel vide cendré
Et le pesant silence d’une contré cent fois morte

Un instant le brouillard s’est soudain écarté
Sur un passage étrange dressé de monolithes
Encombrés de symboles où des ombres s’agitent
Qu’un froid rayon de lune vint alors éclairer

Sur ce curieux tableau jailli l’éclat d’un chant
Une mélodie claire, saisissante en ces lieux
Plus encore l’interprète révélée à mes yeux
Sur laquelle n’eurent de prise ni la vie ni le temps

Dans une blanche robe, étincelante mariée
Sur laquelle tombaient ses cheveux noir de geais
Son front plus pâle encore qu’un diadème couronnait
L’obsidienne de ses yeux aux reflets azurés

L’ovale de ce visage à la beauté sublime
La douceur de ses traits et le cil mutin
La finesse de ses lèvres rehaussées de carmin
Le geste sensuel où tout son corps s’exprime

« Je suis Suspiria, oh mortel passant,
L’unique détentrice de ton âme blessée
Au terme de tes jours, viens donc me retrouver
Avant cette échéance, retourne au monde vivant. »

Aussitôt, dans un souffle, je me vis transporté
Sur l’obscurité mes yeux se sont ouverts
Alors que s’effaçait le songe éphémère
Le long de ma joue grêle une larme à roulé.

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juin 1

Bouffonnerie

Il est certaines pensées comme des clous au coeur
Plantées avec soin pour ajuster le bois
Du cercueil sinistre habité par le froid
Dans lequel on enferme les joies et les bonheurs

Il est certaines humeurs enveloppées de plomb
Qui font l’âme pesante et le corps voûté
Las de toute distraction, par l’esprit enchaîné
A un fardeau si lourd qu’il nous traine vers le fond

Il est des heures si longues qu’on croit éternité
Où tout se cristallise dans un morne tourment
Autour de nos erreurs, nos pénibles instants
Qu’en à peine une seconde on sent sa vie sombrer

Il est des voies perdues où n’existe que le vide
Où de doux souvenirs se changent en douleurs
Impasses infinies qui ne mènent qu’au malheur
Où la lumière du jour n’est qu’un éclat livide

Dans ces tristes moments, le masque doit sourire
Se jouer de ce monde qui le fait tant pleurer
Faire le pitre en sachant tout espoir condamné
Rire à s’en fendre l’âme jusqu’au dernier soupir.

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mai 29

Niobée

Saurais-je vous décrire la versatile beauté
De celle qui de tout temps a faites siennes mes heures
Pourrais-je vous conter la si subtile pâleur
Et la discrète teinte de sa peau veloutée

Vous esquisserais-je encore la douceur de ses lèvres
Leur dessin si léger sublimé d’incarnat
L’émeraude et le jade entremêlent leur éclat
Dans l’iris d’un regard jalousé des orfèvres

Existe-t-il des mots pour vous dire la lumière
Qui court sa chevelure d’ambre et de tangerine
Descendant en cascade sur ses épaules fines
Devant elle le soleil passe pour une chimère

Vous parlerais-je enfin de ses formes éthérées
Toutes en courbes et volutes, collines et vallons
Où le moindre mouvement devient ondulation
Yeux et mains y volettent sans jamais s’épuiser

Elle vit, cette perfection, drapée d’ombre et de brume
Au coeur d’une contré à l’automne éternel
En ses bras chaque instant est une joie nouvelle
Un sourire d’elle vous fait moins pesant qu’une plume

Mais cette belle n’existe qu’à l’autre bout des songes
Dans un pays lointain au creux de mes pensés
Où gisent les souvenirs et les rêves tissés
Loin de l’obscurité et des maux qui me rongent.

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mai 28

Deneb

Tes yeux ont plus d’étoiles que toute galaxie
Ton regard pénètre chaque fibre de mon être
Ta voix douce et ton rire me font toujours renaître
Ton souffle est mon divin élixir de survie

A l’ombre de ton âme je viendrai m’abriter
Oublier tous mes maux, toutes les souffrances hideuses
Abandonner un peu l’existence malheureuse
Qui me fait le coeur lourd et l’esprit agité

En toi je veux me perdre pour mieux te faire hommage
Libéré de mes chaines, du poids de mes tourments
Je veux de ta présence savourer chaque instant
Déesse de mon coeur, si merveilleux présage.

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mai 19

Iris

Vous souvient-il, chère amie
Du soir où votre cœur faiblit
Vous chancelâtes dans mes bras
Perdue par quelque vif émoi

Vos yeux dont le mauve se voila
Quels autres cieux virent-ils là ?
Pour ne point vous voir à terre
Je maintins votre taille légère

Et contre mon épaule virile
Reposait votre cou gracile
L’ébène de votre chevelure
Rehaussant votre pâle nature

Pour vos couleurs retrouver
J’ai votre gorge libérée
Du carcan de votre col droit
L’ouvrant un peu plus pour cela

C’est là que le sens m’a manqué
À l’éclat de cette peau nacrée
Au creux de ce cou palpitant
Sans remords j’ai plongé les dents

La divine liqueur carmin
Attisant largement ma faim
À la fontaine de votre vie
Je me suis goulûment servi

Un frémissement de vos doux cils
Me surprit en cet acte vil
Dans vos yeux je vis la frayeur
À leurs bords l’esquisse de pleurs

Saisi par une grande émotion
Je sus mon abomination
Et comme au sortir d’un cauchemar
Me détournai de vos regards

J’appliquai une main sur vos plaies
Leur sang bien vite coagulation
Et vous voyant vous ressaisir
Je vous priai de me maudire

À ma surprise vous n’en fîtes rien
Plaçant sur mon bras votre main
D’une parole vous m’absolviez
Et d’un doux geste vous me sauviez

Si je rappelle ce souvenir
C’est qu’il me fait bien trop souffrir
N’aurai-je point dû vous achever
Plutôt que comme moi vous damner?

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mai 19

Insomnia

Voici encore la longue nuit
Dans son voile obscur et pesant
Où les fantômes sont si présents
Les heures où le sommeil me fuit

C’est d’abord un souffle, un murmure
Une pensée qui s’insinue
Une ritournelle à l’air connu
Dont les notes crissent contre les murs

Les ténèbres épaisses et poisseuses
Qui viennent alourdir mon coeur
Puis les voix de mes tourmenteurs
L’écho de leurs paroles visqueuses

Bientôt leurs doigts froids, décharnés
Rampant, glissant sur mon visage
Telles des serres, prêtes au carnage
Cherchant à lentement m’étouffer

« Pantin fantoche, imposteur
Dépourvu de toute qualité
A quoi bon vouloir exister
Tu n’es pas même digne de tes pleurs! »

Assénées avec violence
En moi s’immiscent leurs noires pensés
Rongeant mon esprit épuisé
Sans lui laisser aucune chance

Alors reviennent les songes malsains
Les solutions de lâcheté
« Qu’il serait simple d’abandonner
Et d’anéantir le chagrin… »

Une promesse pourtant me retient
Une parole que j’ai donnée
Celle de ne jamais laisser
Quelqu’un qui m’a tendu la main.

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mai 19

Amarante

À la pénombre de ma fenêtre
Je vois le monde s’éveiller
Sur le drap fin et satiné
Dansent les rais du soleil à naître

À ma mémoire vient un printemps
Le souvenir d’une heure passée
Cette couche aux tissus froissés
Par deux corps s’enlaçant

Cette même lumière ce matin là
Glissant sur ton âme assoupie
Qu’étaient tes rêves, belle endormie?
Une simple suite à nos ébats?

Je mirais, moi, les étincelles
Que le jour venait placer
Sur ta peau, d’étoiles constellée
Aux senteurs d’épices et de miel

Tendrement, pour ne pas troubler
Ton sommeil, si léger, si pur
Je mêlais en ta chevelure
Mes doigts blancs à sa teinte cuivrée

Je savourais encore le goût
De tes lèvres, fraîches et charmantes
Au teint des roses si enivrantes
À peine écloses, parfum si doux

De mes yeux je te dévorais
Aimant chaque courbe un peu plus
Et lorsqu’enfin le jour parût
Dans un frôlement je t’embrassais

Il est si loin ce matin là
En mon esprit toujours vivant
Je m’y blottirai en mourant
Laissant derrière chair et lit froid.

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avril 28

Avalon

Sur une terre sacrée, dans les brumes du Rêve
S’ouvre une verte colline au coeur des forêts
Où il y a peu encore s’élevait un palais
Surplombant de son ombre une soyeuse grève

Les murs de pierre douce accueillaient vigne et lierre
Se parant de tentures émeraude ou carmin
Mêlés des rayons d’or de l’astre azuréen
Qui éclaire ces lieux où naissent les chimères

Un splendide jardin entourait la demeure
Bosquet de jeunes arbres en pleine floraison
Champs de roses, de violettes, écloses ou en boutons
Délicates fontaines aux murmures enchanteurs

Ici et là, un banc, sous un saule ombragé
Pour savourer le calme, les merveilleux parfums
Qu’exhalait à toute heure ce havre élyséen
Dans sa pleine lumière où sous une brève ondée

Ce songe au coeur du songe, je l’avais érigé
Pour y faire fleurir des souvenirs précieux
Tisser entre deux mondes un peu de merveilleux
Offrir à une compagne un écrin enchanté

Mais lorsque mon regard, sans lumière, s’est terni
Le sublime palais, soudain, s’est écroulé
Plantes, fleurs et arbustes, tous se sont fanés
L’étoile resplendissant s’est trouvée obscurcie

Rien ne reste aujourd’hui de ce divin endroit
Que ruines érodées et grouillantes ténèbres
Les doux murmures passés se sont fait chants funèbres
Le charme s’est brisé en même temps que moi.

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