mai 12

Félice

De votre doux pelage, sublime félidé
J’apprécie la caresse, le frémissement soyeux
Votre bas ronronnement m’est un chant mélodieux
Et vos minauderies un discours raffiné

Vous êtes si insouciant, libre et toujours tranquille
Le temps glisse sur vous, sans prise, effrayant
Vous laissant inchangé, inexorablement
Sa Majesté le Chat demeure sur son île

Dans un lent mouvement, leste, vous défilez
Méprisant la lumière, vous vous faites de nuit
Impassible, sur cette terre, vous abhorrez l’ennui
D’infimes vibrations ne cessent de vous guider

Créature malicieuse, avide d’indépendance
Vous marchez sur les toits, délicieux funambule
Trottinant joyeusement, poursuivant une bulle
Vous tolérez seulement notre encombrante présence

Lorsque le froid et l’eau tentent de vous saisir
D’un calme petit bond vous vous escamotez
Surgissant de nulle part, devant une cheminée
A la chaleur de l’âtre vous venez vous blottir

Devant vos grands yeux clairs s’ébattent mille mondes
Mais vous restez de marbre, toujours indifférent
Posant votre regard, peu vous importe quand
Sur vos esclaves humains s’agitant dans une ronde

Vous êtes une merveille, beauté faite animal
L’intelligence brille dans vos globes d’argent
Etes-vous bien de ce monde ou n’êtes que passant
Voyageur insouciant escortant les étoiles ?

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mai 11

L’Ancêtre

Le monde m’a vu naitre au creux de sa jeunesse
Alors que rien encore ne l’avait agité
Il attendait, paisible, ses enfant premiers nés
Prêt à leur enseigner son ancestrale sagesse

Mère, qu’ils étaient beaux, ces êtres encore purs
Façonnés dans la glaise sous un ciel radieux
Portant étoiles au front, lumière dans leurs cheveux
Parés des mille splendeurs de la Dame Nature

Ensuite vinrent les fils du roc et des montagnes
Forgeurs de merveilles extraites des sous-sols
Arborant des parures aux arabesques folles
Adoucissant leurs traits, la lourdeur de leur poigne

Tant d’autres après cela, chimères et créatures
Sylphes, dragons et fées, en une grande ribambelle
Bientôt tous rejetés par une espèce nouvelle
Issue de mils croisements: l’humain au cœur dur

En à peine une vie, tous les autres l’ont fuit
Battus ou exilés dans d’autres dimensions
Tant d’êtres se sont éteints sous sa domination
Seulement arrêtée par sa peur de la Nuit

J’ai vu tellement d’horreur, d’innommables actions
Perpétré par ces hommes, ces démons trop humains
Dans ma tour isolée, j’ai protesté en vain
Appelé les Ancêtres, imploré leurs visions

Devant leur cruauté, j’ai du briser mes vœux
Reniant ma réserve, je me suis condamné
J’ai envoyé sur eux ma colère, sans pitié
Pour que cessent les massacres, j’ai déchiré les cieux

Les quelques survivants sont repartis de rien
Apprenant à subir les lois de la Nature
Beaucoup ont succombé sans espoir de futur
Mais au fil des âges, ils ont appris le bien

Et moi dans la prison où mes frères m’ont jeté
Enchaîné où personne n’est jamais venu
Pour une simple leçon qu’ils n’avaient jamais eue
J’ai perdu la jouissance de mon éternité

Seuls me restent les rêves où je puis m’épanouir
Evoluer sans entraves au cœur de l’Ether
Contempler simplement les millions d’univers
Attendant que ce cycle me voit enfin mourir.

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mai 10

L’aventureux

Bientôt je partirai sur cette étrange route
Je laisserai mes pieds suivre leur propre voie
Délaissant mes travaux, je me rêverai roi
Le long des pâturages où seul le vent s’écoute

Je filerai au gré de ses courbes sinueuses
Ne songeant qu’au lointain, aux surprises à venir
N’ayant pas d’autre but que de les parcourir
Assoiffé d’espérances, de rencontres heureuses

Demain je partirai sur ce chemin de terre
Je chausserai mes bottes, partant à l’aventure
Ecoutant les échos, les silencieux murmures
De la voute céleste, mystérieux univers

Je me ferai camelot, artiste itinérant
Profitant des ressources de notre mère nature
Marchant vers l’inconnu, n’ayant pour nourriture
Que l’envie d’avancer, toujours vers le couchant

Hier je suis parti sur ce ruban de pierre
Avec pour seul bagage mes belles résolutions
M’élançant d’un bon pas vers d’autres horizons
Coiffé de mon panache, le port altier et fier

Mais à la nuit tombée, après des heures d’errance
Mon si bel optimisme s’est évanoui
Je croisais le passage d’une terrifiante harpie
Qui me déchiqueta pour voler mon essence

A cette heure où mes jours se sont bien envolés
Voyez tout ce qu’il reste de ce simple rêveur
Je ne suis plus qu’une ombre, sinistre à faire peur
Hantant une maigre tombe perdue dans les fourrés.

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mai 8

Incompréhension

C’est un étrange malaise qui doucement s’installe
Sans heurts, sans crier gare, discrètement il s’invite
Sur nos chaotiques routes, les écueils qu’on évite
Malheureux incident qui soudain se dévoile

Il se pose, silencieux, rampant insidieusement
Se glisse lentement dans de minces interstices
Cherche et trouve les failles de nos amours novices
Et creuse son chemin dans nos égarements

Rien ne presse ce malin, il sait prendre son temps
Rongeant l’une après l’autre nos moindres certitudes
Instillant son poison, causant la solitude
Il attend la bonne heure pour briser nos serments

Son souffle vient attiser nos plus sombres pensés
Semant en nous le doute, les soupçons et la peur
Il vient faire sa moisson, ce sinistre faneur
De toutes nos espérances il se fait un bûcher

Dans ses flammes se consume un rêve de bonheur
Où vivaient à raison nos plus belles idées
Dans l’étreinte de ce feu, en cendres elles vont tomber
Ne laissant derrière elles que le bruit de nos pleurs

Sur cette terre brulée son noir fruit va germer
Faisant surgir les peines, les sinistres tourments
Chacun de nos espoirs happés par son néant
Laissera place en nous à une rage larvée

Ainsi surgit ce mal, ce vénéneux fléau
Venu nous séparer, cherchant la division
Causant notre malheur, il dissimule son nom
Utilisant des masques, insatiable salaud

C’est l’Ennui, cette douleur, l’angoisse du quotidien
C’est aussi la colère, les frustrations cachées
C’est l’incompréhension, l’amertume oubliée
Et tant d’autres souffrances que la vie nous obtient.

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avril 14

Les étoiles sombres

Sous le voile éclatant de leur obscurité
Elles emplissent les cieux, lumineuses absentes
Drapées dans leurs ténèbres, ombres resplendissantes
Masquant leur existence et leur sombre passé

Elles ne quittent leur refuge que pour venir hanter
De leur pas silencieux et leur triste présence
Des êtres éplorés, marqués par la souffrance
Tirant de leur douleur leur essence altérée

Leur souffle mystérieux est empreint d’énergie
Voguant dans l’univers, ne faisant que passer
Elles essaiment leur voyage de biens étranges pensés
Inspirant des images chargées de nostalgie

Semant au gré des vents leurs germes cosmiques
Elles glissent leur néant au cœur même de la Vie
Perpétuant leur espèce par des enfants honnis
Dont l’existence même est une erreur inique

De leur progéniture naissent tous nos regrets
Nos tourments éternels, nos doutes, nos remords
Nous laissant sans repos, ne souhaitant que la mort
Pour gouter un jour au calme et à la paix.

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avril 7

Rêverie

Sous un chêne centenaire, je me suis assoupi
Profitant de son ombre, écoutant son murmure
Je me suis élancé, voletant dans sa ramure
Jouant avec les merles, les moineaux et les pies

J’ai vu passer des ciels aux millions de couleurs
Des astres s’allumer, embrasant l’univers
Des comètes zébrer l’azur de leur poussière
Comme le temps coulait tel un torrent rieur

J’ai vu mon corps tomber, redevenir cendres
Et mon âme s’élever pour arpenter l’espace
De toute l’humanité il n’y eut bientôt plus traces
Si ce n’est quelques ruines noyées sous la terre tendre

Devant mon regard neuf, l’infini s’est ouvert
Révélant ses secrets, sa magie, ses chimères
Chaque onde, chaque atome se sont mis à chanter
A mesure que mon être s’est fait plus éthéré

Tous ces sons en substance racontaient leur histoire
Les spasmes de la naissance, les douleurs, les espoirs
Leur peur de la mort, puis leur évolution
Le lent cheminement vers la résignation

« Voila l’aboutissement, les accords de la Fin »
« Vers la conscience ultime nous suivons le chemin »
Leur chant devient un mot, une syllabe, un phonème
Alors qu’ils fusionnaient, étrange phénomène

Et soudain devant moi parut l’éternité
Primordiale étincelle devenue entité
D’un regard je sus tout, passé, présent, avenir
Tous les plus grands mystères, erreurs, souvenirs

Je devins un instant chaque être de ce grand inconnu
Je savais, sentais tout de chaque individu
Noyé dans l’absolu, la suprême quintessence
Mon âme se dissolvait pour une nouvelle naissance

Alors je revins, graine emporté par le vent
Jeune pousse, si frêle, soumise aux éléments
Puis bientôt tronc solide, porté par mes années
Apprécié des dormeurs pour ma sérénité

J’étais devenu l’arbre gardien de mon sommeil
M’apportant la fraicheur sous ce puissant soleil
Une trille de pinson qui soudain retenti
Me tira du sommeil, me laissant ébahi.

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avril 7

Tourments

Lorsque le monde s’endort en suivant le soleil
Que le monde des rêves dévoile ses merveilles
Mon esprit, seul, demeure, sur son bout de rocher
Refusant le sommeil, ne voulant s’arrêter

Une ombre émergeante prend possession de moi
Glissant insidieusement tout le long de mon corps
Serpentant sous ma peau, infiltre tous mes pores
Jusqu’à m’atteindre au cœur, me distiller son froid

De ses longs tentacules, elle presse mon cerveau
Sinuant, silencieuse, dans les moindres recoins
Nerfs, circonvolutions, tout lui devient chemin
Pour mieux m’asservir, me pousser au défaut

Lentement elle instille ses sinistres idées
Fait le siège de mon âme pour me dénaturer
S’empare de mes pensées, de mes songes fabuleux
Pour mieux les corrompre, en faire cauchemars affreux

Cette sombre entité demeure invaincue
Même si mes efforts la poussent à reculer
Jamais je ne pourrais en être délivré
Elle nage dans mes ténèbres, douloureuse inconnue

Toujours, telle une hydre, d’elle un fragment demeure
De chaque légère blessure elle fait une peur
Nuit et jours dans mes yeux je la vois s’agiter
Car c’est d’une part d’elle que mon être est créé

Je suis elle, elle est moi, triste réalité
Une étincelle de force conquise au néant
Qui lorsque vient le doute attise mon tourment
Pour mieux me renvoyer à ma fragilité.

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janvier 21

Nuit sans fin

Ainsi file le temps, ainsi tourne la vie
La longue nuit s’étire, distillant l’insomnie
Pensés et souvenirs, persistantes questions
Dansent la sarabande, muselant ma raison

Les angoisses enfouies resurgissent en hurlant
Lorsque le jour fuit, elles chargent soudainement
Les barrières dressées pour bloquer leurs assauts
Vacillent à mesures que veille mon cerveau

Les secondes deviennent heures, les minutes des années
Pendant que le sommeil s’attache à m’oublier
Et les engrenages tournent, broyant le moindre éclair
Le plus infime éclat d’un pale rais de lumière

Je peux maudire la Lune, le vent ou les marées
D’empêcher mon esprit de gouter au repos
Mais cela est bien vain, inutile et idiot
Blâmer les éléments, c’est la facilité

Rien ne sort de bien d’une trop grande réflexion
Chaque mot, chaque geste, chaque idée esquissée
Soumise à l’analyse, disséquée, digérée
Malade de trop penser, étrange malédiction.

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octobre 11

Le temps perdu

La vie est faite de brefs instants
Moments uniques et éphémères
S’effaçant dans le courant d’air
De la course effrénée du temps

Chaque seconde est comme une feuille
Emportée par un ouragan
Des souvenirs tourbillonnants
Actes manqués qui nous endeuillent

Nous ne sommes que pauvres brindilles
Ballottées par nos émotions
Hésitants en chaque occasion
Taisant ce que nos cœurs nous crient

Pour préserver des apparences
Reflets de notre fragilité
Nous préférons nous ignorer
Plutôt que tenter notre chance

Pourtant dans le creux de notre âme
Demeurent nos échecs passés
Regrets latents, empoisonnés
Nous mutilant comme des lames

Ces blessures, silencieux remords
Sourdent une lente mélancolie
Une humeur triste les jours de pluie
Rongeant tout l’être jusqu’à la mort.

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septembre 30

Valse lente

Au cœur d’une nuit blanche, pris dans l’obscurité
Se joue une triste danse, lente, presque immobile
Entre le pâle poète et sa muse indocile
Une lutte éternelle pour une page froissée

Devant son écritoire, abruti d’épuisement
Le rimeur s’escrime à vouloir créer
Mais son espiègle muse lui ôte toute idée
Laissant le triste sire à ses mille tourments

Et plus la nuit avance, son esprit s’alourdit
Ses mots se perdent, s’étiolent, retombent en poussière
Chaque pensée, chaque mouvement lui devient un calvaire
Aspirant au repos son corps s’engourdit

Lentement, en silence, le froid vient l’envahir
Absorbé par son œuvre, l’écrivain n’y prend garde
Alors que dans son dos un spectre le regarde
Son sang doucement se fige et sa vie se retire

Et comme un sombre mal peu à peu le dévore
Sa fragile raison s’envole vers une lueur
Un espoir futile éclaire sa pâleur
Mais son essence s’efface, emportée par la Mort.

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