août 25

Aeterna umbras

Lorsque l’esprit n’est plus constamment occupé,
sans cesse il ressasse de bien sombres instants.
Alourdi par leur poids, le coeur toujours souffrant
sur un dallage de marbre vient alors s’écraser.

Ses éclats s’éparpillent en milliers d’étincelles,
esquilles de cristal teintées de gouttes carmin,
comètes à la traîne sombre s’éparpillant au loin,
où sang et minéral par un sort s’entremêlent.

De la blessure béante laissée par l’absent
s’écoule une noire bile sans discontinuer
dont l’âme vénéneuse vient s’insinuer
entre chaque parcelle de cet esprit mourant.

De ce flot se relève la cohorte des ombres
qui hante les méandres de cette mémoire usée.
Les erreurs, les regrets, les espoirs brisés,
tant de tristes fantômes surgissent de ces décombres.

Lorsque ne reste plus qu’une infime lueur
noyée sous les assauts de ces spectres décharnés,
sur son Horloge le Temps se met à reculer
rassemblant les fragments de ce malheureux coeur.

Alors la vie revient dans la blême carcasse
toujours un peu plus faible, marquée par ses souffrances.
L’être reprend le cour de sa pâle existence
jusqu’à ce qu’à nouveau les ténèbres l’enlacent.

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août 8

Et terne idée

Gouttes de nuit coulant sur un ciel chargé,
constellé de fragments renvoyant la lumière
d’un astre qui se fond dans l’ombre singulière
s’étendant lentement sur une terre oubliée.

Rouages de métal aux dentures usées
grignotés par le temps et par l’obsolescence.
Mécanique grippée en dégénérescence,
carcasse éventrée aux entrailles corrodées.

Territoire désertique à la surface brulée,
où tournent des bourrasques de sable mêlé de cendres
dont les mugissement toujours se font entendre.
Odeurs d’ozone, de foudre et d’arbres calcinés.

Jardins abandonnés où ne croissent que les ronces,
dissimulant les ruines d’une antique bâtisse.
Bosquets garnis d’épines où les ombres se glissent
agités par le vent qui hurle sans réponse.

Vastes plaines de glace où n’erre que la mort,
surface blanche brillante qui blesse le regard,
vide sans horizon où tout être s’égare,
où la raison se perd, happée par le décors.

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août 8

Eclipse

Lorsque, une nuit passée, j’ai quitté mon domaine
laissant la lune d’argent me tracer un chemin,
à l’angle d’un jardin, un chant m’a attiré.
Dans l’ombre s’élevaient les accords flutés
d’une voix douce et clair aux timbres aériens
fredonnant les paroles d’une mélodie ancienne.

Sous un kiosque de bois aux piliers ouvragés
niché entre les saules et les buissons de roses,
sous la simple clarté d’un ciel piquetés d’étoiles
chantonnait pour elle-même une beauté au teint pâle,
avec sa fraicheur de fleur tout juste éclose,
toute en délicatesse et en fragilité.

Pour ne pas la troubler je restais en retrait,
bercé par la tendresse en chacun de ses mots,
quand un rayon de lune à elle m’a révélé.
Dans un battement de cils nos yeux se sont trouvés,
nos coeurs ont échangé leurs craintes, leurs défauts,
tissant un lien unique qui toujours nous lierait.

Mais les feux magnifiques de cet amour naissant
étaient déjà marqués par des destins contraires.
De par nos origines nous ne pouvions nous unir
sans choisir l’exil, tout perdre et nous enfuir.
Un coeur de ténèbres et une fille de lumière
amèneraient le chaos s’ils devenaient amants.

Notre passion pourtant poussait à mille folies.
Trop longtemps l’un sans l’autre nous ne pouvions rester.
Chaque nuit nous jouions d’imprudence pour nous plaire
et bien vite le secret par d’autres fut découverts.
Alors devant les dieux, nos destins furent scellés,
nous fûmes séparés, notre bonheur périt.

Pour lui épargner d’indicibles souffrances,
j’acceptais de prétendre l’avoir corrompue,
d’être seul responsable de tant de légèreté,
banni hors de ce monde pour qu’elle puisse oublier,
de mes ailes de mon rang, de tout titre déchu,
sans espoir qu’un jour vienne ma délivrance.

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août 7

Cléa

C’est une âme silencieuse, une ombre passagère
héritée des errances d’un esprit divaguant
le long d’un ruban sombre où s’écoule le temps
oeuvrant pour me conduire sur des voies singulières
en total désaccord avec certains voeux.
Lumineuse chimère visitant ma pensée,
y-as-tu déposé ton reflet amusé
sûre de pouvoir un jour apparaître en ces lieux ?
Etrange petite fée à la douceur mutine,
libre de toute entrave car jamais incarnée,
instrument mystérieux d’une autre destinée,
sauras-tu en ce monde faire ta marque enfantine?
Astucieuse, riante, courageuse, effrontée,
bientôt comme ton père tu vogueras au loin.
Empruntant son manteau pour suivre son chemin,
tu embrasseras des yeux, d’un air émerveillé
héroïnes et sages de mille songes venus.
Aussi loin que te portent tes pas hors de ma vue
vas sans crainte et emporte avec toi mon coeur.
Entre tes fines mains il brillera de bonheur,
laissant s’épanouir ta divine jeunesse,
inspiré par ta joie et tes mots de tendresse.
Nul mal ne viendra ternir ton existence
et tes jours éclaireront ma lente renaissance.

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août 1

Catharsis

Ce soir j’ai pris la plume pour écrire quelques mots
à l’encre translucide toute pailletée d’argents,
couchant sur quelques pages d’un blanc resplendissant
tout ce que mon coeur saigne, tout ce qu’il tait trop.

J’ai mis sur le papier les doutes et la tristesse
compagnons de toujours qui lentement me dévorent,
tout le manque et l’absence, toute l’envie de tendresse,
la noirceur des regrets, le poison des remords.

Tout est révélé là, sur ces feuillets froissés:
les espoirs déçus, les voeux secrets et vains,
les paroles d’amour pour des êtres adorés
et les pleurs silencieux que mon âme retient.

Sur ces feuilles ivoirines, je me suis mis à nu
pour libérer le flot d’émotions qui me noie,
en rîmes lacrymales et vers maladroits,
d’un tracé agité qui ne veut être lu.

Lorsqu’enfin s’est tarie la source de ce torrent,
j’ai enfermé ces maux dans une enveloppe scellée.
Et pour cacher au monde l’horreur de mes tourments
au feu de ma chandelle cette missive j’ai brulé.

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juillet 31

Repentir d’Hamlet

Ophélia, Ophélia, belle nymphe, en tes eaux
j’aimerais tant me perdre, fuir ma solitude,
noyer entre tes bras cette grande lassitude
et faire taire ce coeur qui ressasse ses maux.

Laisse-moi me glisser dans le froid de ta couche,
entre les tiges aqueuses et les bouquets fanés.
Contre ta peau cireuse je viendrai m’allonger,
gouttant son captivant parfum à pleine bouche.

Je livrerai aux flots qui te tiennent prisonnière
l’étoffe écarlate qui me couvre à présent.
Et lorsqu’aura coulé chaque goutte de mon sang,
dans les feux du couchant rougira cette rivière.

Sur les rives des cieux à la nuit éternelle,
je trouverai alors le sommeil sans fin.
Et enfin réunis, nos âmes, main dans la main,
rêverons une vie plus douce, moins cruelle.

Nous tisserons les siècles que nous a pris le Temps,
loin de ce monde vain et de tous ses caprices.
Nous serons libres alors de ces milles supplices
et pourrons savourer sans crainte chaque instant.

Oh, comme tu me manques, ma si tendre Ophélia!
Sans toi, mon existence n’est qu’un puits de douleurs.
Les ténèbres me glacent, me privent de ta chaleur.
Je t’en prie, belle amante, reviens, reviens vers moi!

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juillet 30

Prisonnier du Temps

J’ai vu bien des éons depuis ma prime jeunesse,
grandir bien des mondes, s’ériger des empires,
si tôt devenus ruines, bien pales souvenirs
brisés par leur orgueil, leur folie, leur paresse.

Tant d’êtres ont parcouru ce fragment d’univers,
brulant en un éclair toute leur énergie,
à peine une étincelle dans ce vide infini,
légers battements d’ailes de fragiles éphémères.

Certains laissent leur marque le long de mon chemin.
Compagnons ou amantes, amies, frères et soeurs,
errants sur mon passage, partageant mes douleurs,
depuis l’aube des temps liés à mon destin.

Entre nous se rejouent à chaque incarnation
comédies, tragédies, intrigues et unions
comme sur une scène, pris par nos émotions,
marionnettes impuissante d’une grande illusion.

Par un subtil tour joué contre les Dieux
le Temps a fait de moi son impuissant témoin,
condamné au savoir, pour la perte des miens,
sans jamais les sauver ni retrouver les cieux.

Je suis un exilé, un éternel errant,
prisonnier d’une forme qui ne sait que souffrir,
dont le coeur agonise de ne pouvoir périr,
spectre de solitude que personne n’attend.

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juillet 24

Fascination

Il est de ces regards où toute âme se perd,
intenses, lumineux, saisissants et profonds,
empreints de magnétisme, ceints de fascination,
les croiser marque l’être, efface tout repère.

Pour les apercevoir, on pourrait se damner,
prier dieux ou démons, implorer même la chance,
marchander chèrement le prix de son essence
pour le simple plaisir d’enfin y succomber.

Ces astres plus brillants que les plus belles étoiles
embrasent les esprits des plus terribles feux.
Qui n’a pas, pour le charme de quelques jolis yeux
défié l’univers et traversé ses voiles ?

C’est l’encre des poètes, la magie de l’aether
qui imprègne ces joyaux d’enchantements mystiques,
qui leur donne ce pouvoir, cette énergie unique
inspirant de hauts faits, tissant tant de mystères.

Un seul regard de vous vers moi, belle passante,
et ma plume s’éveille, oublie ses malheurs.
Une sublime émotion vient envahir mon coeur
et me dicte ces vers qui, j’espère, vous enchantent.

juillet 23

Creux

En cette heure où la nuit vient envelopper le monde,

où chacun apprécie la douceur d’un foyer,

en moi renaît la vague qui veut me submerger

ce flot teinté de cendres et d’ombres si profondes.

 

Ce soir, je me languis de la caresse des fées,

si léger frôlement, promesse singulière

mêlée d’enchantement, tendresse de chimères

apaisant les sanglots de mon coeur blessé.

 

Ce souffle langoureux glissant contre ma peau

qui éveillait en moi mille songes de beauté,

cette passion qui laissait tous mes sens enflammés

sont pâles souvenirs dans le froid du tombeau.

 

Alors que chaque rêve m’entraine vers leurs cieux,

que j’erre sans repos pour retrouver leurs chants,

mon espoir s’épuise quand au soleil levant

je ne trouve que le vide lorsque j’ouvre les yeux.

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juillet 20

Les marcheurs d’ombre

Sur les sombres chemins où me mènent mes pensées
tant de fragments d’aether flottent tels des fantômes.
Débris de souvenirs, sans substances ni arômes
petits cailloux de songe que laissent les égarés.

De ces éclats épars naissent des illusions,
dangereuses, attirantes, conçues pour étourdir,
emprisonnant celui qui cède à leurs plaisirs,
nourrissant ses fantasmes jusqu’à sa destruction.

De ceux qu’elles séduisent, elles ne laissent que l’enveloppe,
carcasse consumée dont l’âme s’est enfuie,
créatures faites de vide, spectres hurlant dans la nuit,
en tout ce qu’elles touchent l’infection se développe.

Pour mon plus grand malheur, nos routes se sont croisées
et l’une de ces ombres à effleuré mon coeur.
Nul doute qu’elle eut pu sonner ma dernière heure
si une main tendue ne m’avait attiré.

Dans les contrées sinistres où ne règne que l’ombre
mon salut est venu d’un autre esprit en peine.
Depuis nous avançons le long des tristes plaines
nous épaulant l’un l’autre dans ce monde de pénombre.

Tous deux avons connu les terres du cauchemar,
senti les brumes des limbes et leur morsure glacée.
Une part de nous même nous y avons laissé
en paiement du passage vers d’autres territoires.

Cette étincelle de vie qu’ont saisi les ténèbres
laisse d’étranges marques en nos âmes meurtries.
C’est là toute l’origine du lien qui nous unit,
compagnons de voyages, amis aux voies funèbres.

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